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ARIANE

 

Numéro 10, juin 2003

AsterixDans la mythologie grecque, Ariane était fille de Minos, roi de Crète, et de Pasiphaé. Éprise de Thésée, elle lui remet une pelote de fil qu’il déroule dans le Labyrinthe où il va affronter le Minotaure. Après avoir tué le monstre, Thésée retrouve facilement la voie du retour et s’enfuit de Crète avec Ariane. Pendant son sommeil, celle-ci estFR-1 abandonnée par Thésée sur l’île de Naxos, mais Dionysos l’épouse et l’emmène sur l’Olympe.

Le 4 octobre 1957: le lancement par l’Union Soviétique de Spoutnik-1, premier satellite artificiel de la Terre, marque le début de la conquête de l’Espace. A leur tour les Etats-Unis lancent leur premier satellite, Explorer-1, le 31 janvier 1958.

Depuis 1961, la France montre sa volonté d’être un acteur majeur de l’activité spatiale et créeStella en ce décembre le Centre National d’Etudes Spatiales (CNES), chargé du développement des activités spatiales françaises.

En 1965, la France devient la troisième puissance spatiale lorsque le 26 novembre le premier Diamant-A décolle de l’ensemble de lancement3 “Brigitte” sur le site d’Hammaguir, au Sahara, et place sur orbite une capsule technologique “Astérix”, premier satellite français. Il tourne toujours autour de la Terre.

La base algérienne ne pouvant plus être utilisée après le 1er juillet 1967 selon les accords d’Evian, le CNES se met à rechercher une nouvelle base de lancement pour satellites. Le site idéal de lancement serait celui en zone équatoriale, qui permettrait d’effectuer toutes les missions spatiales dans les meilleures conditions. Après avoir étudié 14 sites, le CNES a sélectionné la Guyane dont le plateau est mis à l’abri de mouvements sismiques. Sous l’aspect climatologique, la Guyane, située entre les anticyclones subtropicaux des Açores et de Sainte-Hélène, subit des vents modérés Est/Ouest, atteignant très rarement 15 à 20 m/s.

Actuellement, grâce au Centre Spatial Guyanais (CSG) fondé en 1966, l’Europe est la seule puissance spatiale à disposer d’une base équatoriale permettant de lancer tant vers l’Est que vers le Nord. Elle dispose de plus de cent degrés d’ouverture autorisant tous les azimuts de tir à partir du même site, tout en utilisant les mêmes moyens et infrastructures de lancement. Tout lanceur opéré du Centre Spatial Guyanais bénéficiera du même avantage et pourra avec le maximum d’efficacité et le minimum d’investissements viser les nombreuses orbites nécessaires à la mise en œuvre et au maintien, en particulier, des satellites en orbite basse ou moyenne.

En 1976, le dernier Diamant quitte le CSG de Kourou. Ce programme est donc arrêté au profit de la construction de la fusée Ariane-1, dans le cadre de l’Agence spatiale européenne (ESA) créée en 1975.

A la différence des lanceurs russes et américains, Ariane a été conçue et optimisée d’emblée pour une mission commerciale. L’analyse s’est révélée exacte: l’espace va prendre une grande importance commerciale, en particulier dans le secteur des télécommunications; les Etats-Unis ne doivent pas détenir seuls le monopole du lancement des satellites d’application. La mission d’Ariane est donc clairement identifiée: mettre Le musee de l'espace (Kourou)en orbite des satellites d’application, et principalement des satellites de télécommunications. La plupart de ces derniers évoluent sur une orbite particulière: l’orbite dite géostationnaire, à 36 000 km d’altitude au-dessus de l’équateur. Un satellite placé sur cette orbite possède une propriété remarquable: il effectue chaque jour exactement un tour de la Terre et paraît immobile à un observateur terrestre; il se comporte ainsi comme s’il était au sommet d’une gigantesque tour de 36 000 km de hauteur, et constitue un excellent relais, fixe, pour les télécommunications.

Le musee de l'espace (Kourou)La première Ariane est lancée avec succès le 25 décembre 1979, depuis le CSG. Ses performances sont choisies en fonction des caractéristiques des satellites de l’époque: une charge utile de 1700 kg doit pouvoir être placée sur l’orbite de transfert vers l’orbite géostationnaire. A cette fin, Ariane-1 est conçue comme un lanceur à trois étages. Les deux premiers étages sont équipés de moteurs-fusées Viking, qui consomment des propergols classiques: de l’hydrazine comme combustible et du tétraoxyde d’azote comme oxydant. Ces propergols sont liquides à température ambiante et ont l’avantage de s’enflammer spontanément lorsqu’ils entrent en contact l’un avec l’autre (il n’y a donc pas besoin d’un allumeur). Le troisième étage d’Ariane-1 est techniquement plus avancé: il utilise des propergols cryogéniques, c’est-à-dire liquides à très basse température (de l’oxygène liquide comme oxydant et de l’hydrogène liquide comme combustible). Ce couple de propergols est d’utilisation délicate, mais il offre des performances incomparables. Le moteur HM-7 qui les utilise sera la clé du succès de la première génération des fusées Ariane. Au départ, Ariane-1 se présente comme une fusée de 47 m de hauteur, pesant 210 t avec, à sa base, quatre moteurs-fusées Viking développant au total 240 t de poussée.

Le lancement initial d’Ariane est le début d’une remarquable aventure technique, industrielle et commerciale. En près de 24 ans 140 Ariane sont lancées, dont 132 avec succès. Pendant les années 1990, le rythme des tirs est de l’ordre de dix par an. Les fusées Ariane détiennent plus de 50 % du marché international des lancements spatiaux commerciaux. Ce marché représente des sommes très importantes. Le prix d’un lancement d’Ariane est de l’ordre de 100 à 150 millions de dollars. Dix lancements par an correspondent donc à un chiffre d’affaires d’environ 1,5 milliard de dollars.

Vue d'ensemble de ELA 3L’une des raisons du succès européen est la création, dès 1980, d’une société privée, Arianespace, chargée de commander, de commercialiser et de mettre en œuvre les fusées Ariane. Les performances d’Ariane ont évolué pour accompagner la forte croissance de la masse des satellites de télécommunications qui intervient tout au long des années 1980 et 1990. Ariane-1 est ainsi suivie d’Ariane-2, d’Ariane-3 et surtout d’Ariane-4, qui devient à partir de 1988 le modèle standard d’Ariane.

Avant même qu’Ariane-4 n’effectue son premier vol (1988), les Européens, une nouvelle fois sur l’initiative de la France, ont commencé à étudier la fusée de l’avenir: Ariane-5 doit être une fusée d’une conception entièrement nouvelle. Sur sa plate-forme de lancement elle mesure 56 m de hauteur pour une masse de 718 t. Sa poussée au décollage est supérieure à 1 000 t. Elle est aussi puissante que les plus grosses fusées en service aux Etats-Unis (la Titan-IV) et en Russie (la Proton). Ses capacités sont impressionnantes : elle peut satelliser25 environ 20 t près de la Terre et envoyer une charge totale de 6 900 kg en direction de l’orbite géostationnaire.

Le développement d’Ariane-5 est l’un des plus grands programmes technologiques jamais entrepris en Europe. Son coût se monte à environ 10 milliards d’euros. Il nécessite la construction de gigantesques installations sur la base guyanaise de Kourou (l’ensemble de lancement ELA-3). Un programme d’essais sans précédent est conduit pour vérifier le fonctionnement du moteur-fusée Vulcain, des propulseurs P-230 et de l’ensemble de la fusée. Ce luxe de précautions n’empêche pas l’échec du premier tir expérimental, le 4 juin 1996. Après 37 secondes de vol, la fusée s’écarte de sa trajectoire par suite d’une défaillance27 dans le système de guidage. Elle explose en vol et sa charge utile (quatre satellites scientifiques Cluster de l’Agence spatiale européenne) est détruite.

Près d’un an et demi a été nécessaire pour identifier les causes de l’échec de la première Ariane-5 (vol Ariane-501) et y remédier. Un premier succès est enregistré avec la mission Ariane-502 en octobre 1997, suivi d’un second avec le vol Ariane-503 en octobre 1998. Dès lors le nouveau lanceur est opérationnel et entame sa carrière commerciale avec un premier tir le 10 décembre 1999. Pendant quelques années, Arianespace va exploiter à la fois les lanceurs Ariane-4 et Ariane-5. Mais à partir de 2003, Ariane-5 restera seule en piste.

Ces changements ne constituent cependant qu’un début. En 1999, le Conseil de l’Agence Spatiale Européenne (ESA) a approuvé des évolutions encore plus importantes. Grâce à un nouvel étage cryotechnique, appelé ESC-A, Ariane-5 ESC-A pourra placer une charge utile de 10 500 kg sur la trajectoire géostationnaire, autrement dit deux gros satellites de communication de 5 tonnes. Trois ans plus tard, en 2006, le moteur HM-7, qui a été développé dans les années 1960 et 1970, sera remplacé par un tout nouveau propulseur cryotechnique appelé Vinci, équipant un étage supérieur plus puissant appelé ESC-B. De la sorte la capacité de lancement d’Ariane-5 sur la trajectoire géostationnaire sera portée à 12 tonnes.

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